L'exemple suédois
La Suède est l'exemple européen en matière de sécurité routière, et est désigné comme le modèle à suivre. Est-ce justifié ? Pourquoi ? Comment ?
Une chronologie de la sécurité routière
En instaurant des limitations de vitesse sur les routes en 1967, la Suède prend un peu d'avance sur ses homologues européens qui n'agiront qu'à partir de 1972-1974. La France, elle, débute timidement en 1969 en limitant les jeunes permis (les babies-boomers obtiennent le permis à cette époque), avant de généraliser les limitations en 1973.
La France prend les devants sur la question de la ceinture de sécurité en 1973, en l'imposant deux ans avant la Suède. La lutte contre l'alcoolisme suit à peu près la même chronologie. Notons cependant que la Suède est, aujourd'hui, plus sévère que la France en ce domaine, mais que le bilan de la tolérance zéro en ce domaine reste mitigé.
Dès 1977, la Suède impose l'allumage des phares le jour, mesure qui serait responsable de la baisse de 10% des collisions frontales dans ce pays et qui ne sera jamais véritablement reprise en France. Depuis 1999, la Suède a mis en place une politique Vision Zéro qui est censée permettre d'atteindre zéro mort sur les routes. La France a développé une nouvelle politique de sécurité routière en 2003, après une promesse électorale en ce sens du président Jacques Chirac de 2002.
La Suède met en place un système de conduite accompagnée en 1993, soit quelques années plus tard que la France. Jusqu'en 1997, on voit que les politiques de sécurité routière de la Suède et de la France sont similaires.
Géographie
La Suède est un pays qui compte 9,22 millions d'habitants pour une superficie de 449 964 km², soit 22 habitants/km². 84% de la population vit en zone urbaine, sur 1,3% du territoire. Le pays compte 140 000 km de routes publiques dont 98 000 km de routes rurales et 40000 de routes communales. Le pays dispose également de 280 000 km de routes privées, principalement des voies forestières, souvent ouvertes au public.
La Suède compte deux frontières directes, avec la Norvège et la Finlande. Elle est reliée au Danemark par le pont d'Öresund. Les échanges commerciaux par voie terrestre sont donc fortement limités.Le pays compte 3,9 millions de voitures soit 440 véhicules / 1000 habitants, représentant 63 milliards de véhicules.km. [Source]
La France est un pays qui compte 64,5 millions d'habitants (7 fois la Suède), pour une superficie de 675 000 km² (1,5 fois la Suède), soit 94 habitants/km² (4,3 fois la Suède) et 77% de taux d'urbanisation. Le pays compte 1 million de km de routes (7 fois la Suède) dont 600 000 km de voirie urbaine.
La France compte des frontières avec : l'Espagne, l' Allemagne l'Italie, la Belgique, la Suisse, le Luxembourg et Monaco. La France dispose d'un parc de 30 000 000 de voitures particulières, soit 491 / 1000 habitants (10% de plus que la Suède) qui représentent plus de 560 milliards de véhicules.km (près de 9 fois la Suède).
On le voit, ces deux pays n'ont guère de points communs : l'un des deux est situé à une extrêmité de l'Europe et voit son réseau routier réduit à sa plus simple expression, l'autre constitue un point central européen et est traversé de part en part par des hordes de camions qui empruntent un réseau routier relativement dense. L'un est peu peuplé, essentiellement dans les grandes métropoles, l'autre est densément peuplé. Ces seuls points doivent permettre de s'interroger sur le nombre de km parcourus dans chacun de ces deux pays (de 1 à 9) et sur les risques d'accidents qui en découlent mathématiquement sans même prendre en compte le climat ou les infrastructures. Comparer le bilan de sécurité routière entre deux pays si différents n'a donc guère de sens, si ce n'est dans le cadre d'une propagande.
Bilan de sécurité routière
En parlant de propagande, il est possible d'observer à quel point la politique de la Suède (guère différente de la politique française) a été efficace en terme d'évolution :
| Date | Suède | France |
| 1973 | 1177 | 15469 |
| 2001 | 541 | 7720 |
| 2006 | 441 | 4709 |
| Date | Suède | France |
| 1973-2001 | 54% | 50% |
| 1973-2006 | 62,5% | 69,5% |
| 2001-2006 | 18,5% | 39% |
Le plus étonnant dans le bilan suèdois, est la stagnation des statistiques sur la période 1997 (date de la mise en place de la politique Vision Zéro) 2001 à 541 décès, en passant par un pic à 591 décès en 2000. Or, c'est cette politique qui se caractérise par une inefficacité flagrante sur la période 1997-2001 qui constitue le modèle français et européen dès 2002. Il n'en reste pas moins que l'on observe une évolution encourageante entre 2001 et 2006, due en grande partie à une politique volontaire visant notamment à moderniser les infrastructures et séparer les flux par catégories d'usagers, permettant d'observer les plus gros progrès en zone urbaine.
La politique Vision Zéro s'appuie sur 11 points : Axer les efforts sur les routes les plus dangereuses, sécuriser la circulation locale, responsabiliser les usagers, responsabiliser les aménageurs, sécuriser les cyclistes, assurer la qualité des transports, rendre les pneus neige obligatoires, utiliser les technologies de pointe, répression des infractions, aider les organisations bénévoles, aider au financement des routes. Le travail suédois sur les infrastrutures, la prévention, la responsabilisation des acteurs, les différents modes de financement ou la prise en compte des différences entre usagers n'est à aucun moment pris en compte dans les politiques française et européenne, puisque la politique française a résumé ce programme à la répression des infractions via l'utilisation des technologies de pointe(radars automatiques) et la politique de Bruxelles à l'allumage des feux de jour, ce qui ne figure sur aucun des points de la politique Vision Zéro qui est censée servir de modèle.