La non-réforme du permis de conduire

Publié le par Winston Smith

Demandée par Nicolas Sarkozy, cette réforme semble inéluctable : le permis coûte trop cher et le taux de réussite n'est pas satisfaisant. La réforme devrait s'articuler sur plusieurs points :

D'une part, il convient d'encourager la conduite accompagnée, qui a prouvé son efficacité en terme de réussite à l'examen. L'examen du code devrait quant à lui être individualisé pour le rendre plus souple ; Le permis à 1 euro devrait recevoir de nouvelles dotations ; Le nombre d'inspecteurs pourrait augmenté de 55, sur 200 réclamés par les professionnels du secteur, et les départs à la retraite devraient être compensés sur les deux prochaines années. Une visite post-permis, un an après l'obtention de ce dernier, pourrait être mise en place. Enfin, l'épreuve de conduite devrait être modifiée, de manière à faciliter l'obtention du permis de conduire.

Quelques chiffres :

Les permis concernant majoritairement les jeunes conducteurs sont essentiellement le B (automobile) et dans une moindre mesure le A (motos de plus de 125 cm3). Respectivement, le nombre de délivrance de chacun de ces permis, a baissé de 8% et 8,5% entre 2001 et 2006. 

L'examen du permis le plus technique et difficile reste le le permis A. Il s'agit aussi du permis qui obtient les meilleurs taux de réussite : 70% contre 52% pour le permis B.

Parallèlement, 50% des 18-24 ans sont titulaires d'un permis (contre 95% pour les 25-34 ans), et représentent 6,8% des titulaires du permis de conduire.

Concernant les accidents de la circulation, ils représentaient 21% des tués sur les routes et 22% des blessés en 2007.Les jeunes conducteurs sont donc largement surreprésentés dans les accidents de la route. 

Les mesures

La décision du renforcement de la conduite accompagnée intervient alors même que le bilan de ce système est controversé : « Les statistiques montrent encore un léger gain en termes de sécurité pour les conducteurs passés par l’AAC au cours des deux premières années, mais à partir de la troisième année, la courbe de leurs accidents rejoint celle des conducteurs passés par la filière traditionnelle. »[source] De l'aveu même du gouvernement, il faudrait donc réformer le système de conduite accompagnée, avant même de le mettre en avant dans le cadre de la réforme globale du permis de conduire ;

L'évolution du code suit quant à lui une logique que permet la technologie, sans remettre en question son fonctionnement ou son efficacité ;

Le permis à 1 euro et les aides au financement restent des idées nobles. Mais les mesures visant à aider financièrement les candidats, pourtant inscrites à la Loi de Finance, ont jusqu'aujourd'hui été des échecs, lorsqu'il ne s'agissait pas d'outils de propagande ou de communication gratuite au bénéfice du gouvernement et non de la sécurité routière : elles n'ont pas su trouver leur public. L'estimation initiale de 150.000 prêts en 2007 pour le permis à 1 euro, révisée à  102.550 prêts en 2008, pour un objectif de 91.000 prêts en 2009.

Le nombre d'inspecteurs au permis de conduire reste un problème récurrent depuis des années, responsable des délais colossaux pour obtenir un passage à l'examen. Le gouvernement a décidé de ne pas ouvrir de nouvelles lignes budgétaires visant à régler ce problème.

L'idée de la visite post-permis, si elle est retenue, pose à nouveau un problème de financement.

Enfin, la réforme de l'épreuve de conduite vise simplement à augmenter le taux de réussite sans revoir la formation : il s'agit véritablement d'un nivellement par le bas particulièrement malvenu lorsqu'on considère la sur-représentation des jeunes permis dans l'accidentologie routière.Or, comme le montre le permis moto, ce n'est pas la complexité du permis qui pose problème dans le taux de réussite, mais bel et bien la qualité de la formation.

Une non-réforme

On le voit, cette réforme ne s'appuie absolument pas sur le bilan de sécurité routière des jeunes conducteurs,  n'agit en aucun cas sur la qualité de l'enseignement, mais vise un nivellement vers le bas en facilitant les épreuves de conduite plutôt qu'en renforçant la formation.  L'objectif est clairement financier, tant pour les candidats que pour l'Etat qui se désengage de plus en plus du pendant formation / éducation / prévention de la politique de sécurité routière, au grand profit des radars automatiques qui, eux, voient leur dotation budgetaire exploser (+10% en 2009 à 201 700 000 euro). [source]

En 2003, promesse avait été faite, que l'argent collecté par le CSA devait être prioritairement réemployé dans les volets formation / prévention. En 2007, les volets éducation / formation et prévention / communication représentent moins de 13% des sommes collectées par le CSA. La loi de finance 2009 fait par ailleurs apparaître une baisse de 1,2 % des crédits par rapport à 2008 pour l'éducation routière, par la réduction des crédits consacrés à l'organisation des examens du permis de conduire.

L'Etat montre aujourd'hui sa volonté de ne pas investir pour former les jeunes dans les meilleures conditions, et ainsi faire baisser une sinistralité préoccupante par rapport au reste de la population, en décridibilisant un peu plus une politique de sécurité routière qui s'appuie essentiellement sur le contrôle sanction automatisé mis en place fin 2003, et qui ignore délibérément les véritables problèmes dès lors qu'ils nécessitent des investissements.

Publié dans Sécurité Routière

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